Sortir du triangle victime, bourreau et sauveur

Déc 4, 2023 | Apprendre à se connaitre, Podcast, Sauver son couple

Êtes-vous familier avec le triangle victime, bourreau et sauveur ? Si non, je vous invite à découvrir mon précédent article : Le triangle dramatique de Karpman.

Dans cet article, nous allons approfondir ce sujet afin de comprendre :

  • Pourquoi nous maintenons-nous dans ces rôles de victime, bourreau et sauveur ?
  • En quoi contribuons-nous à alimenter cette dynamique relationnelle ?
  • Comment sortir de ces rôles pour se construire de belles relations épanouissantes sans jeux psychologiques ?

Rappel des rôles du triangle

Avant d’entrer dans le vif du sujet, je vous propose tout de même un petit rappel pour se rafraîchir la mémoire. Sur le triangle de Karpman, il existe trois positions que l’on peut adopter en tant qu’être humain. Il s’agit de la victime, du bourreau ou du sauveur. 

La victime

La victime est une personne qui se sent impuissante, opprimée ou maltraitée dans une situation donnée. C’est celle qui se met dans une posture de petite chose fragile et qui recherche de la sympathie et de l’aide. 

La victime confond le fait de se plaindre avec le fait de demander de l’aide. Souvent, dans la relation amoureuse, le lien s’entretient autour des problèmes de la victime et du sauveur qui tente de les résoudre. Si bien que souvent la victime a toujours quelque chose qui va mal pour (inconsciemment) conserver le lien.

Le bourreau

Le bourreau ou persécuteur est une posture qui va être sévère, froide, autoritaire et intimidante. C’est un rôle qui fait peur à l’autre et donc on peut avoir peur de lui tenir tête, peur de le contrarier au risque de subir des représailles. Avec cette posture, le bourreau cherche le respect ou la domination en confondant puissance et violence.

Dans la relation amoureuse, cela peut être une personne qui craint que l’on franchisse ses limites au point de les faire valoir de façon inadéquate. C’est une posture en général assez rigide où il n’y a pas beaucoup de place pour la remise en question.

Le sauveur

Enfin, on a le sauveur. C’est un rôle qui affiche une posture généreuse, altruiste, protectrice et bienveillante. C’est celui ou celle qui fait tout pour la relation, qui donne énormément et qui a besoin de se sentir utile. 

Dans la relation amoureuse, le sauveur confond le fait d’être aimé avec le fait d’être indispensable. Et attention, petite précision, ce n’est pas parce que vous avez envie ou besoin de vous sentir utile que cela signifie que vous adoptez constamment une posture de sauveur. 

Les bénéfices cachés de ces rôles

Dans l’article précédent, je vous parlais du déroulé des parties de jeux psychologiques avec le triangle de Karpman. Dans les grandes lignes, il y a un générateur de jeu. C’est-à-dire que un des individus dans la relation démarre la partie et attend de voir si l’autre choisit de rejoindre la danse ou non. Auquel cas, celui-ci ou celle-ci endosse un des rôles restants. 

En bref, si vous avez suivi, vous avez conscience que ces parties de jeux ne sont pas très fun. Souvent, ce sont des conflits récurrents avec le sentiment que c’est toujours le même schéma qui se répète. Et au-delà de se répéter, cela ne contribue aucunement à faire avancer la relation ou se sentir bien dans celle-ci.  

Les avantages des postures victime, bourreau et sauveur

Quand on est en posture de victime, ce n’est pas agréable de se sentir persécutée, opprimée et impuissante. 

Le sauveur n’est pas ravi d’entretenir sa croyance que quoiqu’il fasse ce n’est jamais assez puisque l’aide apportée à la victime ne sera jamais complètement adéquate ou suffisante. 

De même, quand on est dans la posture du bourreau, on n’est pas nécessairement ravi d’endosser “le mauvais rôle”. Nous vivons dans une société fondée sur la notion de bien et de mal. De fait, rare sont les personnes qui désire entretenir le sentiment d’être “une mauvaise personne”. De plus, tout simplement, on peut avoir conscience que nos comportements peuvent être violent dans la relation.

Alors pourquoi adopte t-on ces rôles ? 

Tout simplement parce que, comme je le mentionnais, il y a ce qu’on appelle des bénéfices cachés ou des bénéfices secondaires. C’est très fréquent qu’en séance de coaching on vienne me voir en m’exprimant : 

  • “Je ne comprends pas, je n’ai pas envie d’être là-dedans, ça ne me plait pas mais la situation se répète sans cesse”

Voire même qu’on me dise qu’on essaye de changer la donne, de faire les choses différemment mais que, irrémédiablement ça se répète. 

Alors si c’est votre cas, ce n’est aucunement parce que vous avez un énorme problème, que vous êtes bizarre ou un cas désespéré. Non pas du tout. Souvent, ce qu’il se produit est qu’il y a des avantages à rester dans la dite situation. C’est ce qu’on appelle donc les bénéfices secondaires.

Les avantages de la victime

Pour commencer avec les avantages de la victime, je vais vous donner toute la sagesse d’Andréa, 16 ans, qui écrit dans son journal intime : 

“J’hésite à casser avec M. puisqu’en fait quand j’ai un copain, je m’invente toujours des problèmes pour qu’il voit que je ne vais pas bien et qu’il me chouchoute… C’est assez problématique.”

La victime, celle qui se plaint et apitoie obtient donc le bénéfice qu’on prenne soin d’elle. 

Elle obtient ainsi sympathie et attention. En adoptant le rôle de la Victime, une personne peut recevoir de l’attention, de la compassion et de la sympathie de la part des autres. Cela peut renforcer son sentiment d’importance.

De plus, cela lui permet d’être dans une forme de passivité et d’éviter de prendre ses responsabilités. Cela peut aussi permettre à quelqu’un d’éviter la responsabilité de ses actions ou de ses problèmes, car les autres sont susceptibles de prendre en charge la situation à sa place.

C’était exactement mon cas quand j’avais 16 ans comme j’ai pu l’écrire dans mon journal intime. J’allais fréquemment mal parce que c’était une façon que j’avais trouvé pour ressentir l’amour de mon partenaire.

Vivre des situations difficiles nous permet de ressentir le soutien et l’amour de nos proches. Puisqu’en général, quelqu’un qui nous aime aura envie de prendre soin de nous et d’être à nos côtés dans les difficultés.

Le déséquilibre pour moi venait du fait que j’omettais complètement la possibilité d’être aimé et de ressentir de l’amour même quand tout va bien. 

Les avantages du sauveur

En ce qui concerne les bénéfices cachés du sauveur, c’est assez intuitif. Il se prouve qu’il est quelqu’un de bien en aidant les autres. Il cherche à racheter sa faute. En fait ce qu’on dit généralement c’est qu’un sauveur essaye de se sauver soi-même en sauvant les autres.

En se plaçant dans le rôle du Sauveur, une personne peut se sentir valorisée et importante. Elle se perçoit comme celle qui peut résoudre les problèmes des autres. D’où, comme je le mentionnais précédemment la confusion entre être indispensable et être aimé. 

Cela permet également d’éviter de regarder ses propres besoins. En se concentrant sur le bien-être des autres, le Sauveur peut éviter de faire face à ses propres problèmes, ce qui peut lui donner un sentiment de satisfaction personnelle.

C’est un peu comme si, à défaut de se prendre en main, on vivait par procuration le bonheur des autres. Les sauveurs sont généralement celles et ceux qui vont dire “moi ce qui me rend heureux ou heureuse, c’est de voir les gens que j’aime heureux”. 

C’est bien entendu une jolie démarche mais elle demande tout de même, une forme d’équilibre dans le fait de ne pas s’oublier. Les sauveurs et sauveuses qui font tout pour les autres ont généralement un déclic un jour. Celui de réaliser qu’il ou elle se connaisse très peu, ne savent pas trop ce qu’ils aiment ou encore où est-ce qu’ils ont envie d’aller dans leur vie. Ce sont un peu les people pleaser, les “comme tu veux” dès qu’il faut prendre une décision.

Les avantages du bourreau

Pour terminer, on a le bourreau. Ses avantages à lui sont le fait d’avoir le sentiment d’être respecté et de bien faire valoir ses limites.

En prenant le rôle du Persécuteur, une personne peut se sentir plus en contrôle de la situation, ce qui peut contribuer à renforcer sa confiance en elle.

Cela lui permet aussi d’éviter une forme de vulnérabilité. Critiquer et juger les autres peut être un mécanisme de défense pour éviter de faire face à ses propres insécurités.

Ce rôle, c’est la carapace qui permet de se protéger et de se sentir d’une certaine façon en sécurité.

Comment sortir du piège ?

Alors comment faire pour sortir de ce triangle dramatique ? Le meilleur moyen est de ne pas rentrer dans le jeu.

Le premier point qui nous permet donc d’en sortir est déjà d’avoir conscience de ces différents rôles.  

Vous avez d’ailleurs peut-être déjà des personnes ou des situations en tête où vous vous dites :

« Ah mais là c’est un comportement de sauveur » ou « mais oui, il s’est mis en victime » etc. 

Sachez d’ailleurs que souvent, c’est bien plus facile de repérer le rôle de l’autre donc pour identifier le vôtre, demandez-vous où vous pensez être positionné face aux deux rôles restants du triangle. 

Si l’autre est en victime c’est que potentiellement, vous êtes en bourreau ou en sauveur. 

La victime 

Pour sortir de ces rôles, quand on se positionne en victime, on peut déjà prendre conscience qu’on est en train de se plaindre et s’apitoyer. Il convient alors de prendre également conscience qu’on dispose de ressources sur lesquelles on peut s’appuyer. 

On peut aussi choisir de sortir de la plainte pour formuler des demandes claires et précises.

Dans le cas où l’on est en face d’une victime, on peut inviter la personne à se centrer sur son problème actuel et l’inviter à s’orienter solution ou l’inviter à verbaliser des demandes claires. 

Dans ce cadre là, je vous invite tout de même à prendre conscience que vous n’êtes pas le ou la thérapeute de votre partenaire alors faites très attention à ne pas glisser dans cette posture. Auquel cas, vous continueriez à alimenter le jeu. Donc vous avez tout à fait le droit d’exprimer que vous acceptez d’être présent pour l’autre s’il ou elle formule clairement ce dont il ou elle a besoin. Tout comme vous avez le droit de vous retirer et refuser d’être simplement la poubelle émotionnelle.

Le bourreau 

Pour le rôle de persécuteur, l’idée est d’identifier la source de frustration et les besoins insatisfaits. Plutôt que de critiquer ou de reprocher, on peut déjà développer ses capacités de tolérance et d’ouverture mais aussi regarder ce qu’on condamne chez l’autre. 

C’est fréquent que ce qu’on reproche soient des choses que l’on ne s’autorise pas soi-même.

Vous avez sûrement déjà entendu la phrase :

« je suis exigeant avec les autres mais encore plus avec moi-même ». 

Quand on se positionne en bourreau, on peut ainsi être amené à devoir développer sa flexibilité.

Quand on est en face d’un bourreau, ce qu’on fait pour sortir du triangle c’est poser clairement ses limites. On ne rentre pas dans la contre accusation, la justification ou autre. Il faut bien comprendre que la violence s’installe progressivement. Un mot déplacé, un claquement de porte, une insulte etc. Donc il convient de poser ses limites dès le tout premier dépassement.

Le sauveur 

Enfin pour le sauveur, on apprend à rendre leur autonomie aux autres. Plutôt que de les couver, on peut être dans une forme d’aide saine où l’on est un appui si besoin. 

De même, on trouve des façons constructives d’obtenir de l’attention et de nourrir son ego.  On peut être aimé sans être utile aux autres. Rappelez-vous qu’on n’a rien besoin de FAIRE pour être aimé. On peut se contenter de simplement d’ÊTRE. Si vraiment ce besoin d’être utile est intense, on peut faire du bénévolat, trouver un métier qui a du sens, faire des “bonnes actions” à nos yeux régulièrement et ce, de façon inconditionnelle.

Ensuite, quand on est face à un sauveur, on peut refuser d’endosser le rôle de victime. 

C’est-à-dire qu’on refuse l’aide non sollicitée ou, si la personne insiste, on peut également confier des tâches qui vont être plus ingrates, moins valorisantes. Si bien que le sauveur se lassera de lui-même d’apporter de l’aide parce que ça ne viendra répondre à son besoin.

Pour aller plus loin 

Bien entendu, le simple fait de découvrir cette notion de jeu psychologique ne va pas nécessairement faire que cela ne se manifestera plus dans votre vie. C’est évidemment plus complexe que les quelques exemples que j’ai pu vous mentionner dans cet épisode ou le précédent. 

Pour approfondir le sujet, je vous conseille de lire le livre de Christel Petitcollin qui s’intitule: 

Je le trouve vraiment très pertinent et cela balaye suffisamment le sujet pour passer du domaine de l’incompétence à la compétence avec de la pratique. 

Ayez tout de même conscience que cela peut arriver à tout le monde d’endosser ces rôles, que parfois c’est très inconscient et que même quand on est dans une partie de jeu on peut se dire “mais attends, pourquoi j’ai accepté d’endosser ce rôle ?” Quand on est en plein dedans, il se passe plein de choses en nous, des émotions, des peurs, des sentiments d’injustice etc. Si bien que, même avec de la théorie ou de la pratique, ça ne veut pas dire qu’on va viser juste à chaque fois. 

Mais en tout cas, on peut se mettre en chemin pour que cela se produise de moins en moins fréquemment.

Pour finir, si dans vos relations, vous observez tout cela, vous voyez ce triangle et désirez en sortir mais sans trop savoir comment vous y prendre, je serais ravie de vous épauler dans cette démarche. 


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